

Philippe Gloaguen, fondateur Le Routard
Les débuts
Né de la mouvance « soixante-huitarde » qui engendra Libération et Nouvelles Frontières, le Routard trouve ses racines dans la littérature beatnik (Kerouac) et la vague musicale et culturelle qui en découla (du flower power de San Francisco au road movie ambiance Easy Rider). Son succès n’est pas seulement marketing : il tient avant tout à des valeurs, partagées par le lectorat qu’il reflète : melting pot d’humanisme, d’écologie, de respect des peuples, d’autodérision, d’humour bon enfant, de quête d’authenticité, de nostalgie des paradis perdus et de clins d’œil à Tintin…
Tout a commencé en musique... En 1968, Philippe Gloaguen écoute le Métèque de Moustaki et la musique de Macadam Cow-boy. Et, entre deux pavés lancés contre les CRS (c’est du moins ce que colporte la légende), il rêve de « la route des Zindes »...
En 1972, de retour des contrées mythiques enfin arpentées (Istanbul, Téhéran, Islamabad, Goa, Katmandu), Philippe se précipite dans le bureau du fondateur d’Actuel, Jean-François Bizot : « Chef ! chef ! Je tiens un reportage d’enfer ! » Bizot fut le premier à avoir entre les mains, le manuscrit du Guide du routard... Pas moins de 22 pays en un volume !
Sentant monter en lui la flamme d’une vocation naissante, Philippe entame un nouveau genre de trek himalayen : le tour des éditeurs parisiens. Le Guide sera refusé par 19 maisons d’édition. Dans l’une d’elles, on ira jusqu’à lui répondre avec un rien de mépris : « On ne peut pas à la fois éditer les mémoires du général De Gaulle et un livre pour les routiers » (sic)...
Finalement, un éditeur microscopique (mais visionnaire) parie sur cette formule originale pour l’époque : un guide de voyage destiné aux jeunes fauchés. Ironie du sort, le premier éditeur du Routard meurt écrasé par un autobus. Mais entre-temps, le guide est encensé par la presse, y compris celle de droite ! Les intellos vont jusqu’à disserter sur cette étrange façon de voyager, les mains dans les poches et la fleur entre les dents...

